FLETOUNTO (FORGERON)

Bourian
Bourian
Bourian

Le forgeron exerce un métier artisanal, mais qui évolue en rejoignant les techniques de traitement des matériaux. Son métier consiste à exécuter tous les travaux de forgeage (chauffe, soudage, façonnage). Le forgeron définit les moyens de fabrication et organise la production en atelier, par l’utilisation des métaux et des alliages qui servent à créer des outils. Il conduit des machines, comme un marteau-pilon, souffle pour la réalisation des pièces par la déformation de blocs de métal chauffés. Dans l’exercice d’une telle mission, il lui est nécessaire de savoir pratiquer des essais, de procéder à des séries de mesures, d’effectuer des réglages destinés à corriger les défauts constatés.

De plus, le forgeron étudie le plan de la pièce à réaliser. Il détermine le procédé de forgeage, puis assure les opérations comme l’étirage et le roulage qui donne au bloc de métal sa forme et ses dimensions. Il est à la base de la conception de l’outillage et de sa réalisation. Être forgeron c’est avoir de bonnes notions en métrologie, et s’adapter aux nouvelles technologies.

I. IDENTIFICATION DE L'ELEMENT

I. 1. Nom (tel qu'utilisé par les communautés)

En fongbé : FLETOUNTO

I.2. Domaine(s) de classification, selon l’UNESCO

Savoir-faire artisanal

I.3. Communauté(s), groupe(s) et individu(s) liés à la pratique

Les personnes et groupes liés au métier du forgeron sont entre autres : la famille DOSSOUGBETE, la famille HOUINSSOU à Masséhouè.

I.4. Localisation physique

- Lieu(x) de la pratique au Bénin

Ouidah et un peu partout dans le pays…

- Pratique similaire au Bénin et/ou à l’étranger

 La forge se pratique partout dans le monde

I.5. Description détaillée de la pratique

Forgeron, un métier de lignage familial
Les forgerons de Ouidah sont des artisans spécialisés dans le travail des métaux comme le fer, l’acier, l’aluminium, le cuivre. Ils façonnent les métaux à l’aide de techniques de travail traditionnelles pour fabriquer des objets comme : des houes, des coupe-coupe, des haches, des libots, des dabas, des binettes, des pièges à gibier, des assins (autel portatif), des adjas (cloches de Fâ), des lampions.
A Ouidah les matins, arrivés dans leurs ateliers, les forgerons (plus précisément dans la famille DOSSOUGBETE) effectuent des rituels pour implorer les mannes de leurs ancêtres, le rituel consiste à citer les noms des ancêtres qui ont travaillé dans l’atelier avant eux en tapant sur leurs enclumes en terre battue avec leurs marteaux-pilons. Ce rituel les permet d’être protégés par les mannes de leurs ancêtres contre les accidents de travail au cours de la journée. Le rituel est d’une importance au point où lorsqu’on oublie de le faire, les accidents de travail peuvent survenir pendant la journée.
Le soir déjà à 18h30 les forgerons doivent tout éteindre et laisser place aux ancêtres car selon les propos de Mr Damien, forgeron et détenteur du patrimoine actuellement à Ouidah, , les ancêtres travaillent le soir après la fermeture de l’atelier d’où il est interdit de travailler la nuit dans la forge familiale.

I.6. Langue(s) utilisée(s) dans la pratique

Le Fongbé

I.7. Éléments matériels liés à la pratique

Patrimoine bâti

Il n’existe pas de lieux communs consacrés au métier de forgeron à Ouidah. Chaque forgeron dispose de son atelier de travail ou de sa forge. La forge populaire et plus reconnue à Ouidah est celle de la famille DOSSOU-GBETE communément appelé AGBANOU-FLESSA

Objets, outils, matériaux supports

Les outils type du forgeron sont les suivants :
– la forge appelé Wohoun en langue local, où les pièces de métal sont chauffées afin de pouvoir leur donner leur forme,
– l’enclume en terre battue, une masse sur lequel travailler le métal,
– le marteau-pilon, pour battre le métal et lui donner la forme voulue,
– les pinces ou tenailles, qui permettent de manipuler le métal incandescent en toute sécurité.
Les objets et matériaux utilisés par les forgerons pour le forgeage sont entre autres : fer de 14, fer de 8, fer de 6, tôle, carrosserie des voitures en ruine qu’ils achètent et découpent, des coques de noix de palme utiliser comme combustible dans la forge.

II. APPRENTISSAGE ET TRANSMISSION DU PATRIMOINE

II.1. Modes d’apprentissage et de transmission

En général à Ouidah, pour la transmission du savoir-faire du métier de forgeron, les artisans de ce dernier recrutent toute personne désireuse d’apprendre ce métier qu’ils forment en contrepartie d’une somme non fixée pour une durée indéterminée. Mais dans la famille DOSSOUGBETE, qui est détentrice de ce patrimoine artisanal à Ouidah, la transmission se fait de père en fils ; dans le but de perpétuer le savoir-faire dans la famille ; c’est d’ailleurs la raison pour laquelle après une naissance dans la famille ils prélèvent des résidus de fer et le sable dans la forge familiale, qu’ils enterrent avec le placenta et le cordon ombilical de ce dernier. Ce rituel signifie que peu importe ce que cet enfant deviendra dans la vie, il pratiquera selon son bon-vouloir le métier du forgeron dans la forge familiale Agbanou-flessa.
La transmission de père en fils n’empêche pas la famille DOSSOUGBETE d’accueillir aussi des apprentis dans leur forge familiale, d’ailleurs ce sont eux qui ont formé les premiers forgerons de Ouidah.

II.2. Personnes/organisations impliquées dans la transmission

Il n’existe pas d’organisation chargée ou impliquée dans la transmission de ce savoir-faire ci. Il n’y a que les familles DOSSOUGBETE et HOUINSSOU et le reste des forgerons de la ville qui s’en chargent.

III. HISTORIQUE

III.1. Repères historiques

Le métier de forgeron à Ouidah entre migration et héritage
Avant le XVIIème siècle à Ouidah, la forge proprement dit ne se pratiquait pas ; néanmoins certaines personnes fabriquaient des lampions, réparaient des marmites et des bassines trouées : ce sont eux qu’on appelait forgeron. Au XVIIème siècle, l’ancêtre de Mr DOSSOUGBETE Damien a émigré de Cana Dodomè (situé à Abomey), où il était forgeron, pour s’installer dans le royaume Xwéda dans le but d’offrir ses services de forgeron à la population autochtone.
Arrivé à Xwéda, il monta un hangar qui lui servira d’atelier de travail ou de forge. A l’entrée de ce hangar (la forge) il installa la divinité Ogou (divinité de fer) qu’il avait rapporté de chez lui, pour sa propre protection et pour la prospérité de ses activités. C’est ainsi qu’il fut le premier forgeron proprement dit menant ses activités à Xwéda l’actuelle Ouidah. Il fabriquait des houes, des coupe-coupe, des haches, des aiguisoirs (libots), des dabas, des binettes, des pièges à gibier, des adjas (cloches), des lampions mais il était plus spécialisé dans la fabrication des assins (autel portatif).
Il initia une cérémonie annuelle à la divinité ; pour la remercier de la protection et prospérité qu’elle a accordée à sa famille durant toute l’année, cette cérémonie dure trois jours. Les descendants de ce forgeron perpétuent jusqu’à présent cette cérémonie. Pendant la cérémonie la famille DOSSOU-GBETE fait des offrandes à la divinité. De plus, toute personne (en général les artisans) ayant contact du métal pendant son travail peut ramener ses outils qu’on étale devant la divinité dans la forge et sur lesquels on effectue des prières et des rituels pour la protection de cette personne.
DOSSOUGBETE fonda sa famille à Ouidah et y résida. Au fil des temps les forgerons qui étaient là avant son arrivée ont décidé d’approfondir leur connaissance dans le métier en se faisant former dans l’atelier de DOSSOUGBETE, c’est ainsi qu’il forma des artisans forgerons comme lui. Dans le but sauvegarder et de conserver ce savoir-faire dans sa famille, il initia la transmission de père en fils ; il apprit le métier à ses enfants.

III.2. Évolution/adaptation/emprunts du patrimoine

Les forgerons à Ouidah essaient de s’adapter comme ils peuvent à l’évolution des outils et matériaux de travail mais ils n’ont pas pour autant changé les anciennes habitudes, ils utilisent toujours les techniques traditionnelles. Contrairement aux anciens temps, les forgerons actuels ont amélioré leurs œuvres.

IV. VIABILITÉ DU PATRIMOINE ET MESURES DE SAUVEGARDE

IV.1. Viabilité

Vitalité

Le métier de forgeron menace de disparaître de la ville de Ouidah. La génération actuelle ne s’y intéresse pas vraiment et les artisans actuels vieillissent. Mr Damien DOSSOUGBETE atteste qu’il n’y a plus d’apprentis comme avant et que le taux a considérablement régressé. 

 

Menaces et risques

L​e métier de forgeron est une activité très accidentogène. Des coupures et écrasement des mains, des projections de poussière de métal, des fumées des lubrifiants des matrices, s’ajoutent les expositions aux fortes températures et aux brûlures thermiques et les exigences de manutentions et postures contraignantes : sont les risques élevés du métier de la forge.

Menaces de disparition

Le métier de forgeron menace dangereusement de disparaître de Ouidah. Les jeunes trouvent ce métier trop difficile, pas intéressant et pas trop utile. Mr Damien DOSSOUGBETE dit que les jeunes fuient ce métier car il demande beaucoup d’efforts et de muscles. Aussi les artisans de ce métier sont tout le temps en contact avec le feu donc de la chaleur.

Conflits d’usage

IV.2. Mise en valeur et mesure(s) de sauvegarde existante(s)

Modes de sauvegarde et de valorisation

Pour sauvegarder ce savoir-faire, les familles détenteurs ont mis en place le système de la transmission de père en fils pour perpétuer le savoir-faire non seulement dans leurs familles mais dans la ville. Mais les enfants ne veulent pas toujours pratiquer le même métier que leurs parents ce qui fait que très peu de jeunes y sont formés. Le métier est donc fortement menacé dans sa dimension de pérennisation.

Actions de valorisation à signaler

Modes de reconnaissance publique

IV.3. Mesures de sauvegarde envisagées

IV.4. Documentation à l’appui

Récits liés à la pratique et à la tradition

Inventaires réalisés liés à la pratique

Bibliographie sommaire

Filmographie sommaire

Sitographie sommaire

V. PARTICIPATION DES COMMUNAUTÉS, GROUPES ET INDIVIDUS

V.1. Praticien(s) rencontré(s) et contributeur(s) de la fiche

Nom, Fonctions​, Coordonnées​

DOSSOUGBETE Damien,  Forgeron, 97 67 05 28
DOSSOUGBETE Bônon, Prêtre vodoun de la famille, 97 65 27 36

Fonctions

DOSSOUGBETE Damien,  Forgeron, 97 67 05 28
DOSSOUGBETE Bônon, Prêtre vodoun de la famille, 97 65 27 36

Coordonnées

DOSSOUGBETE Damien,  Forgeron, 97 67 05 28
DOSSOUGBETE Bônon, Prêtre vodoun de la famille, 97 65 27 36

V.2. Soutiens et consentements reçus

MÉTADONNÉES DE GESTION

Rédacteur(s) de la fiche

– ZINSOU Modeste
– Hervé ACCROMBESSI
– DJOTON Oluwachéoun Mireille
– TOSSOU Ryan, AGBLO Laurent,
– ADOSSOU Carmel Koffi Rodolphe.

Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré

QUENUM Carhel, Coordonnateur de l’enquête

Lieu(x) de l’enquête

Ouidah, Agbanou

Date/période de l’enquête

21 Juillet 2021

Date de remise de la fiche

Année d’inclusion à l’inventaire

N° de la fiche

FI_13

Identifiant ARKH