Depuis la nuit des temps, les hommes construisent pour s’abriter ou encore montrer leur rang social. Les styles, les matériaux de construction varient selon les cultures et les générations. La construction d’habitations en terre battue est un de ces anciens savoir-faire des peuples en Afrique. Les premiers bâtisseurs l’ont transmise de génération en génération. Économique et écoresponsable, cette construction comparativement à d’autres, a beaucoup plus d’avantages mais malheureusement est délaissée car trop souvent associée à l’image d’un monde rural, en retard et sous développé.
Dô mi min (MAISON EN TERRE DE BARRE)
I. IDENTIFICATION DE L'ELEMENT
I. 1. Nom (tel qu'utilisé par les communautés)
En Fongbé : Dô mi min
I.2. Domaine(s) de classification, selon l’UNESCO
Pratique traditionnelle
I.3. Communauté(s), groupe(s) et individu(s) liés à la pratique
Toute la population de Ouidah
I.4. Localisation physique
- Lieu(x) de la pratique au Bénin
Commune de Ouidah et un peu partout au Bénin
- Pratique similaire au Bénin et/ou à l’étranger
Togo, Côte d’Ivoire, et un peu partout en Afrique
I.5. Description détaillée de la pratique
– L’Argile comme matière première : les maisons en terre battue sont construites en argile, généralement en argile rouge. C’est un savoir-faire très ancien, et bien distinct de la maçonnerie occidentale qui est beaucoup plus vue comme la discipline de construction moderne avec comme élément principal le ciment.
– La prise des mesures : construire en argile est une question de savoir faire. Des spécialistes de ce type de travaux sont invités pour faire un devis. Tout devis commence d’abord par la démarcation ou délimitation à l’aide de fils. Les angles droits auparavant sont mesurés grâce à une corde à douze nœuds. Quelques fois, en fonction de son expérience, le bâtisseur défini arbitrairement les mesures.
– Des instruments qui évoluent : les équerres modernes importés étaient aussi utilisées mais devenus moins justes, ils auraient peu à peu été remplacées par des équerres fabriquées par des soudeurs. L’étape de démarcation est cruciale et très importante, ce n’est qu’après elle que le prix est fixé. Il est important de faire attention à la prise des angles sous peine de voir le bâtiment s’effondrer ultérieurement.
– La signature du chantier : une fois la démarcation faite, selon la coutume, une cérémonie serait faite afin de bénir le chantier. Le bâtisseur planterait alors un piquet pour signifier à ses congénères qu’il détient déjà le chantier. Il y a aussi des chantiers où le travail se fait en coopérative, les travailleurs sont donc nourris par l’instigateur du chantier.
– L’approvisionnement en argile : l’étape qui suit est la mise à disposition de l’argile. A l’aide des pieds on la malaxe avec de l’eau pour la rendre élastique. Ce traitement spécifique de l’agile est très laborieux mais les travailleurs le font à cœur joie. Lorsque la texture voulue est atteinte après le malaxage de l’argile, une file de travail se forme alors pour livrer au bâtisseur de gros morceau d’argile déjà malaxée. Les travailleurs se lance les mottes d’argile jusqu’à ce qu’elles parviennent au bâtisseur qui fais la disposition.
– La construction par couche : ce dernier commence à poser la première couche bien épaisse d’environ 50cm de haut. Une fois cette couche séchée, une seconde est également posée dessus et ainsi de suite jusqu’à trois ou quatre poses supplémentaires en général. Ce type de construction nécessite une grande quantité d’eau d’où l’importance de disposer de tonneaux pour stoker de l’eau pendant les travaux.
– La finition ou crépissage : les murs une fois séchés sont crépissés à l’aide d’un mélange de l’argile et du sable fin. Des maisons à étage seraient construites aussi grâce à cette technique. L’argile non séchée est très vulnérable à l’eau surtout à l’eau de ruissellement.
Une fois la construction achevée, le bâtiment est livré au propriétaire qui peut en disposer selon son bon vouloir.
– Avantages : ce type de construction a beaucoup d’avantages. D’abord il est peu onéreux car la matière première est disponible dans le milieu en quantité. Il faut juste intéresser les travailleurs qui vont le chercher et le préparer contrairement au ciment qui est vendu et dont le prix augmente chaque fois. Ensuite, il faut dire que cette construction est écoresponsable en préservant à la fois la nature et l’environnement contrairement à une carrière d’exploitation de calcaire avec toutes les conséquences environnementales qu’on connaît. Enfin, ce type de construction offre une température agréable à l’intérieur en toute saison. Pas besoin de climatiseur en temps de chaleur ou de chauffage en temps de fraîcheur. C’est donc financièrement économique dans la durée aussi.
I.6. Langue(s) utilisée(s) dans la pratique
Le Fongbé
I.7. Éléments matériels liés à la pratique
Patrimoine bâti
Aucun lieu n’est dédié à la construction des maisons en terre de barre
Objets, outils, matériaux supports
Les matériaux qui sont utilisés sont entre autres :
– Djiga qui signifie la pioche utilisée pour creuser afin d’obtenir la terre de barre ;
– Alinsor qui signifie la daba utilisée pour ramasser la terre obtenue après creusage ;
– Règle en bois pour prendre des mesures ;
– Tonneau pour stocker l’eau utilisée pour la construction ;
– Kôkpanou, une sorte de machette à lame courbée utilisé exclusivement pour morceler la terre recueillie ;
– Equerre pour prendre des mesures.
II. APPRENTISSAGE ET TRANSMISSION DU PATRIMOINE
II.1. Modes d’apprentissage et de transmission
Pour devenir maçon spécialisé en construction de maisons en terre de barre, les aspirants suivent, et assistent les anciens quand ils prennent des marchés de construction : c’est ainsi qu’ils apprennent au fur et à mesure ce métier. Il n’y a pas de centre de formation, ni d’atelier pour apprendre ce métier. Aussi l’apprentissage n’a pas une durée fixée et aucun diplôme qui atteste la fin de la formation. La transmission se fait souvent de père en fils.
II.2. Personnes/organisations impliquées dans la transmission
Ce sont les anciens maçons qui se chargent de transmettre le savoir-faire aux aspirants. Ils apprennent aux contacts de ces derniers en participant activement lors du processus de construction de la maison en terre battue.
III. HISTORIQUE
III.1. Repères historiques
La construction en terre battue à toujours été très liée aux peuples africains en général. C’est un mode de construction qui a été pensé par les ancêtres d’abord compte tenu des matériaux accessibles (la terre rouge est disponible dans la plupart des régions en Afrique) et ensuite compte tenu du confort, de la fraîcheur, et la résistance aux aléas climatiques.
III.2. Évolution/adaptation/emprunts du patrimoine
Pour des raisons de la rareté du chiendent, les pailles utilisées pour couvrir la toile de la maison construite sont remplacées par les tôles et les plafonds. Aussi pour crépisser les murs, le ciment est maintenant utilisé.
La cérémonie d’ouverture du chantier n’est plus nécessairement effectuée pour des raisons de croyance religieuses.
IV. VIABILITÉ DU PATRIMOINE ET MESURES DE SAUVEGARDE
IV.1. Viabilité
Vitalité
Ce métier vivant est bien rentable à ses pratiquants qui vont souvent même à l’étranger l’exercer.
Menaces et risques
Ce métier demande assez d’énergie. Il dépend aussi grandement du climat. En saison sèche le sol est sec donc il est plus pénible de creuser pour obtenir la terre de barre. Et pendant la saison des pluies les murs sèchent moins vite et le risque que ces murs s’écroulent est assez élevé.
Menaces de disparition
Ce métier est effectivement menacé de disparaître car dans la plupart des villages aujourd’hui les gens veulent vivre comme en ville, par conséquent les maisons en terre de barre se font de plus en plus rares et les constructeurs qui le font disparaissent également peu à peu.
Conflits d’usage
Ceux qui construisent en brique aujourd’hui dans les villages sont considérés comme bourgeois, ce qui associe une image péjorative à la construction en terre de barre.
IV.2. Mise en valeur et mesure(s) de sauvegarde existante(s)
Modes de sauvegarde et de valorisation
Pour sauvegarder cette pratique, les pratiquants forment gratuitement à qui le veut.
Actions de valorisation à signaler
Pour valoriser les maisons en terre de barre, tous les artisans constructeurs devraient avoir des maisons en terre de barre.
Modes de reconnaissance publique
On reconnaît une maison en terre de barre par la couleur rouge ou par la toiture en paille.
IV.3. Mesures de sauvegarde envisagées
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IV.4. Documentation à l’appui
Récits liés à la pratique et à la tradition
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Inventaires réalisés liés à la pratique
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Bibliographie sommaire
– AZONTONDE, Anastase , Dégradation et restauration des terres de barre (sols ferrallitiques faiblement désaturés argilo-sableux) au Bénin, 1993
– Centre national d’agropédologie (Cenap), BP 988, Cotonou, Bénin.
Filmographie sommaire
CONSTRUCTION DE MAISON EN TERRE AU BENIN : https://www.youtube.com/watch?v=UdV84V70dJs
Sitographie sommaire
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V. PARTICIPATION DES COMMUNAUTÉS, GROUPES ET INDIVIDUS
V.1. Praticien(s) rencontré(s) et contributeur(s) de la fiche
Nom, Fonctions, Coordonnées
– HOUEHOU Félix, Bâtisseur, 68 29 68 37
– AGBOGNIHO Dénis, Maçon, 97 25 04 52
Fonctions
– HOUEHOU Félix, Bâtisseur, 68 29 68 37
– AGBOGNIHO Dénis, Maçon, 97 25 04 52
Coordonnées
– HOUEHOU Félix, Bâtisseur, 68 29 68 37
– AGBOGNIHO Dénis, Maçon, 97 25 04 52
V.2. Soutiens et consentements reçus
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MÉTADONNÉES DE GESTION
Rédacteur(s) de la fiche
– ZINSOU Modeste
– Hervé ACCROMBESSI
– DJOTON Oluwachéoun Mireille
– TOSSOU Ryan, AGBLO Laurent,
– ADOSSOU Carmel Koffi Rodolphe.
Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré
– ZINSOU Modeste
– Hervé ACCROMBESSI
– DJOTON Oluwachéoun Mireille
– TOSSOU Ryan, AGBLO Laurent,
– ADOSSOU Carmel Koffi Rodolphe.
– QUENUM Carhel
Lieu(x) de l’enquête
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Date/période de l’enquête
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Date de remise de la fiche
Année d’inclusion à l’inventaire
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N° de la fiche
FI_15
Identifiant ARKH
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