Le sel produit traditionnellement à Ouidah provient de Djègbadji (qui veut dire littéralement bas-fonds de sel). Ce sel est extrait du sable au bord de la lagune de Ouidah (Djèssin) constituant une importante source de production saline. L’activité de production du sel est spécifiquement menée par les femmes qui travaillent souvent en coopérative. Les hommes les accompagnent dans certaines tâches comme le ramassage de bois, la confection des paniers et des cabanes en bois recouvertes de feuilles de palmiers qui servent d’ateliers de production de sel pour ces dernières.
Djè Dida (PREPARATION DU SEL)
I. IDENTIFICATION DE L'ELEMENT
I. 1. Nom (tel qu'utilisé par les communautés)
En Fongbé : Djè Dida
I.2. Domaine(s) de classification, selon l’UNESCO
Pratique liée à l’artisanat local
I.3. Communauté(s), groupe(s) et individu(s) liés à la pratique
Avant le sel est produit le long de la côte DE Togbin à Grand-Popo . Dans la commune de Ouidah La plupart des femmes de Djègbadji prépare le sel. Elles travaillent ensemble dans une coopérative nommée DOUMAVO dont le président est M. FANOU-DOSSOU Paul. Les familles qui travaillent dans cette association sont entre autres :
– AHOKIN
– ZANKOU
– DEKON
– KOFFI
– FANOU-DOSSOU
Etc.
I.4. Localisation physique
- Lieu(x) de la pratique au Bénin
Le long de la côte de Togbin à Grand-Popo, enquête menée dans l’Arrondissement de Djègbadji le long de la lagune de la Commune de Ouidah
- Pratique similaire au Bénin et/ou à l’étranger
On prépare le sel un peu partout en Afrique et dans le monde, cependant la technique de préparation diffère selon le lieu et l’ethnie de chaque peuple.
I.5. Description détaillée de la pratique
– Un outillage rudimentaire : la préparation du sel débute par la mise en place de l’équipement nécessaire. Le matériel essentiellement rudimentaire est composé de : deux houes (une pour le ramassage de sable et l’autre pour le sarclage), un panier pour récupérer le sable, un seau pour verser de l’eau sur le sables, une bassine qui sert de réceptacle pour la saumure, une marmite qui sert de cuisson de la saumure et une palette ou sorte d’assiette pour ramasser les déchets qui surnage la saumure pendant la cuisson.
– Une chimie à vue d’oeil : après la mise en place du matériel, on procède au sarclage et au déblayage de la terre destinée à l’extraction du sel. Une fois le soleil ardent, on vérifie la présence ou non de minuscules cristaux brillants sur le sol. La présence de ces cristaux sur le sol permet de déterminer sa richesse en sel. Ce sont ces portions de terre qui seront exploitées lors de l’extraction du sel.
– Le ramassage du sable précieux : on ramasse le sable de ces portions dans un panier à l’aide d’une houe spéciale qu’on met dans les filtres artisanaux. Le filtre est composé de roseaux de bois et de grosse pique disposé en entonnoir.
– Le filtrage, une technique spéciale : le sable est déposé dans le filtre, on y ajoute l’eau de la lagune de Ouidah et on recueille dans une bassine la solution salée qui en découle appelée : la saumure. On vérifie par la suite la teneur en sel de cette solution grâce à un densitomètre particulier : des noix de palme (ce sont des noix qui sont tombés naturellement du palmier). Lorsque la solution est riche en sel, les noix flottent. Cependant, elles coulent lorsque la solution n’est pas riche en sel. Ce liquide est stocké dans des tonneaux et installé dans les cases qui servent d’atelier.
– La préparation proprement dite : après ce processus de vérification, on procède ensuite à la préparation de cette solution saline dans de grosses marmites sur un grand foyer à trois ou quatre poses (un foyer peut alimenter trois ou quatre marmites de préparation). Les déchets qui surnagent la saumure pendant l’ébullition sont retirés par une palette ou assiette au fur-et-à-mesure. Le sel est obtenu après évaporation totale de la saumure. Le sel obtenu mis dans une passoire afin d’égoutter tout l’eau qui reste à l’intérieur.
I.6. Langue(s) utilisée(s) dans la pratique
Le Fongbé, le Xwlagbé et le Xwédagbé.
I.7. Éléments matériels liés à la pratique
Patrimoine bâti
Chaque femme possède son espace de d’exploitation de sel Djè Zandji et son atelier de production du sel appelé : Djè-xo ; ce sont des cabanes en bois recouvertes de feuilles de palmiers où elles préparent et extraient le sel.
Objets, outils, matériaux supports
Le sel est produit à partir de plusieurs matériaux. Ce sont :
– de grosses marmites pour cuire le sel ;
– une cabane en bois aéré recouvert de branche de palmiers ;
– un foyer a plusieurs socles (3 ou 4) pouvant accueillir plusieurs récipients pour la cuisson ;
– deux types de houes (l’une pour débroussailler la terre et l’autre pour le ramassage du sable) ;
– des bassines ;
– des seaux en plastiques ;
– un filtre artisanal pour extraire la saumure ;
– des tonneaux ou bidons pour accumuler de la saumure ;
– des calebasses ;
– des bâches ou sachet pour recouvrir le sable prélevé contre les intempéries ;
– noix de palme (Dékin) que les femmes utilisent pour mesurer la salinité de la saumure
– spatule ou palette pour enlever les dépôts d’imperfection à la surface de la saumure.
II. APPRENTISSAGE ET TRANSMISSION DU PATRIMOINE
II.1. Modes d’apprentissage et de transmission
Les enfants assistent leurs mères tout au long du processus de fabrication, c’est de là qu’ils apprennent le mode de préparation du sel.
II.2. Personnes/organisations impliquées dans la transmission
La fédération ‘’DOUBOGAN’’ est la principale organisation qui s’occupe de la production de sel dans le village de Djègbadji et des villages avoisinant de la côte. Elle est présidée par FANOU-DOSSOU Paul.
III. HISTORIQUE
III.1. Repères historiques
Il y a fort longtemps les populations riveraines de la lagune ont remarqués que tout comme l’eau de la lagune qu’ils utilisaient pour la cuisine, le sol était encore plus salé. Ils ont alors mis un système en place afin d’extraire le sel de ce sable. Ce sel qu’ils produisaient servait de monnaie d’échange avec les autres royaumes d’alors. Les royaume d’Allada et de Danxomè envoyaient des serviteurs chercher ce sel qui était exclusivement utilisé pour la cuisine dans l’ensemble du palais. La préparation du sel était une activité pratiquée par les femmes et les hommes, avec le temps les hommes se consacraient plus à la pêche et laissèrent peu à peu cette activité aux femmes qui préparaient le sel en majorité aujourd’hui. C’est un savoir-faire hérité des ancêtres et transmis de génération en génération.
Par ailleurs, une mission envoyée de la commune Guérande (dans les années 90°, une ville française avec l’initiative de former les femmes de la côte de Ouidah sur une nouvelle technique de préparation de sel qui consiste à faire sécher la saumure au soleil pour obtenir le sel au lieu de la cuisson classique au feu de bois. Cette technique de préparation fût adoptée par une minorité de femmes notamment du village Houapkè. Cependant certaines femmes de Djègbadji n’ont pas adopté cette technique compte tenu de sa faible rentabilité contrairement à la technique de préparation classique. Les reproches que ces femmes faisaient à la cette méthode de fabrication de sel par séchage, fait que la poussière de l’air se mélange au sel et que ne laisse pas non plus passer les déchets de la saumure.
III.2. Évolution/adaptation/emprunts du patrimoine
Autrefois, les femmes utilisaient les branches de palétuviers comme source d’énergie pour l’extraction du sel. Mais avec l’interdiction de la coupe de cette espèce due à la dégradation de la mangrove, les femmes productrices de sel utilisent actuellement d’autres espèces de bois comme : l’acacia, l’eucalyptus, les troncs et les branches de cocotiers ainsi que de palmiers à huile qu’elles achètent (fagots de bois).
IV. VIABILITÉ DU PATRIMOINE ET MESURES DE SAUVEGARDE
IV.1. Viabilité
Vitalité
La production de sel est une activité plus ou moins rentable mais qui demande beaucoup de patience, et également la pression du marché international. Le sel traditionnel produit à Djègbadji a la particularité de se dissoudre plus vite que les autres.
Menaces et risques
Les douleurs musculaires, et les températures extrêmes de cuisson du sel sont des difficultés qui peuvent porter atteinte à la santé des productrices de sel.
Menaces de disparition
Certaines difficultés comme ; l’interdiction d’exploitation abusive du bois et le débordement du fleuve Mono sont des facteurs qui limitent le rendement de cette activité. Aujourd’hui le coût d’achat des matières premières qui entre dans la préparation fait que la production de sel est une pratique très contraignante pour les productrices.
Également la production du sel subit la pression constante du marché du sel international qui limite le rendement de cette activité au Bénin.
Conflits d’usage
Le sel traditionnel produit par les femmes de Djègbadji est accusé par certaines personnes d’être de mauvaise qualité. Il faut également noter que le marché béninois est constamment inondé du sel des pays comme le Nigéria, le Togo, le Burkina, la Chine etc moins chères et donc consommé par les béninois.
IV.2. Mise en valeur et mesure(s) de sauvegarde existante(s)
Modes de sauvegarde et de valorisation
La qualité du sel produit de façon traditionnelle prend en compte la période de production ; La plupart des femmes du village de Djègbadji préparent le sel et maîtrisent les savoirs faire de cette pratique qu’elles transmettent à leur descendance qui apprennent en suivant leurs parents et en les assistants dans le processus de fabrication.
Actions de valorisation à signaler
Les femmes se sont regroupées dans une fédération de fabrication de sel ‘’DOUBOGAN’’ qui serait reconnu sur le plan juridique.
Modes de reconnaissance publique
Le sel traditionnel produit à Djègbadji a la particularité de vite se dissoudre dans l’eau comparé aux autres sel produits à l’usine. Il est primordial de faire la promotion de ce sel local par la consommation locale.
IV.3. Mesures de sauvegarde envisagées
–
IV.4. Documentation à l’appui
Récits liés à la pratique et à la tradition
–
Inventaires réalisés liés à la pratique
–
Bibliographie sommaire
Filmographie sommaire
Destination Bénin : La culture à Ouidah, c’est aussi DJEGBADJI https://www.youtube.com/watch?v=KHRYs1punM0
Sitographie sommaire
– Djègbadji, village du sel : https://www.monnuage.fr/point-d-interet/djegbadji-village-du-sel-a126937
– Préparation du sel à Djègbadji au Bénin : du sable au chlorure de sodium : https://lanouvelletribune.info/2013/12/preparation-du-sel-a-djegbadji-au-benin-du-sable-au-chlorure-de-sodium/
V. PARTICIPATION DES COMMUNAUTÉS, GROUPES ET INDIVIDUS
V.1. Praticien(s) rencontré(s) et contributeur(s) de la fiche
Nom, Fonctions, Coordonnées
KOFFI Cécile, Préparatrice de sel et ex présidente de la coopérative des femmes préparatrices de sel ‘’DOUMANVO’’, 97 59 05 15
Fonctions
KOFFI Cécile, Préparatrice de sel et ex présidente de la coopérative des femmes préparatrices de sel ‘’DOUMANVO’’, 97 59 05 15
Coordonnées
KOFFI Cécile, Préparatrice de sel et ex présidente de la coopérative des femmes préparatrices de sel ‘’DOUMANVO’’, 97 59 05 15
V.2. Soutiens et consentements reçus
–
MÉTADONNÉES DE GESTION
Rédacteur(s) de la fiche
– ZINSOU Modeste
– Hervé ACCROMBESSI
– DJOTON Oluwachéoun Mireille
– TOSSOU Ryan, AGBLO Laurent,
– ADOSSOU Carmel Koffi Rodolphe.
Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré
QUENUM Carhel, Coordonnateur de l’enquête
Lieu(x) de l’enquête
Ouidah, Arrondissement Djègbadji
Date/période de l’enquête
12 Août 2021
Date de remise de la fiche
Année d’inclusion à l’inventaire
–
N° de la fiche
FI_14
Identifiant ARKH
–


