Le bourian est une danse traditionnelle folklorique du Brésil qui a été introduite au Bénin par Francisco Félix de SOUZA puis est revenu à la famille NEVIS qui y est actuellement fortement lié. Les descendants d’esclaves affranchis (revenues du Brésil et des Amériques sur leurs terres ancestrales) au Bénin notamment à Ouidah après l’abolition de l’esclavage en sont les principaux acteurs. C’est un type de carnaval, une célébration rituelle ou encore un festival largement répandu chez les Agoudas. Des personnages déguisés avec des masques représentant des animaux ou des célébrités défilent en dansant. C’est un spectacle à la fois drôle et identitaire.
BOURIAN
I. IDENTIFICATION DE L'ELEMENT
I. 1. Nom (tel qu'utilisé par les communautés)
En Portugais : Bourian
I.2. Domaine(s) de classification, selon l’UNESCO
–
I.3. Communauté(s), groupe(s) et individu(s) liés à la pratique
La plupart des familles Agoudas de Ouidah sont liées à la danse du Bourian. On peut citer :
– DE SOUZA
– NEVIS
– DO REGO
– DA SILVA
– DA MARTHA
– NASSARA
– d’ALMEIDA
– VIERRA
– RODRIGUEZ
– DOMINGO
– GOMEZ
– NACIMIENTO
– d’OLIVEIRA
Les pratiquants de cette danse ont créé une association pour gérer de façon efficace les problèmes et les difficultés liées à la pratique de la danse du Bourian. La Fédération des Groupes Musicaux Bourian (FEGROMUB) dont l’objectif est de restaurer, de revaloriser et faire rayonner la culture afro-brésilienne Bourian au Bénin.
I.4. Localisation physique
- Lieu(x) de la pratique au Bénin
Maison NEVIS Arrondissement 1 ABATA1, Maison DE SOUZA et dans la plupart des maisons Agoudas de Ouidah
- Pratique similaire au Bénin et/ou à l’étranger
La danse du Bourian est répandue un peu partout en Afrique principalement dans le Golfe de Guinée ou les descendants d’esclaves ont migrés pour un retour à la terre de leurs ancêtres. On les retrouve au Togo, au Nigeria, au Sénégal et en Amérique Latine d’où elle provient.
I.5. Description détaillée de la pratique
Une origine brésilienne
Ne danse pas dans un groupe bourian qui veut. Les chants et les danses liés à cette pratique sont un héritage identitaire des Agoudas c’est-à-dire que le bourian est dansé uniquement par les membres du lignage Agoudas ou ayant une ascendance Agoudas. Un Agouda est un descendant africain ayant séjourné au Brésil. Pierre Verger (1968) dit à ce propos : « Ces Africains et descendants d’Africains ayant séjourné au Brésil, principalement à Bahia, retournèrent en Afrique, porteurs de coutumes, d’habitudes, de modes de vie qu’ils avaient acquis en terre étrangère ou auxquels ils s’étaient attachés pour toujours. Ils retournent en Afrique, ‘ brésiliennisés’, ‘bahianisés’, ‘portugalisés’ dans leurs diverses habitudes, leurs goûts, coutumes et même dans leurs vices ».
Une danse mutiforme
D’après les propos de M. NEVIS Bernardin héritier, et actuel président et chef d’orchestre du groupe musical bourian, la troupe qui danse le bourian autour du défunt pendant la cérémonie mortuaire tournera sept fois autour du corps du défunt s’il s’agit d’une femme et neuf fois s’il s’agit d’un homme. Cette dernière danse en mémoire du défunt est censée apaiser son âme et lui permettre de reposer en paix.
Le bourian se danse également lors des cérémonies joyeuses comme la communion, le mariage ou encore un anniversaire. En effet, le groupe de danseurs bourian est composé d’une vingtaine de Agoudas de diverses familles qui ont appris les chants et la gestuelle du bourian et peuvent l’exécuter avec aisance et prestance vêtus de tenues de couleurs vives et des masques représentants des têtes d’animaux et de célébrités d’allure folklorique et mythique.
Une histoire qui se raconte en danse
Les danseurs du bourian ne font pas que danser. Ils racontent une histoire tout comme le ferait une comédie musicale. C’est une illustration d’un brassage interculturel hérité de leurs ancêtres déportés. Le groupe de danse bourian peut également être convié pour des prestations rémunérées par des particuliers non Agoudas au cours de diverses célébrations. Les frais varient en fonction du lieu et du statut de la personnalité qui convie le groupe.
Il est important de préciser qu’en plus des frais de prestation artistique, le bourian a une portée spirituelle. En effet, avant toute sortie, il faut faire au groupe des offrandes en nature composées de boissons sucrées et bière.
Le bourian autrement
Les recherches ont permis de détecter une autre pratique de la danse masquée Bourian dans la ville capitale du Bénin qu’est Porto-Novo. Là-bas, c’est l’Association des ressortissants brésiliens résidants à Porto-Novo qui en a le monopole aux côtés de la famille AMARAL, groupe détenteur du Bourian. La fête du « Seigneur de Bonfim » le jour de l’Epiphanie y est célébrée en une procession dans la ville à la sortie de la messe dite à cette intention.
Cette procession est soutenue par le rythme « Marcha » exécuté par une fanfare avec des personnages du Bourian. Notons que la famille AMARAL utilise les Pandeiros pour faire sa musique Bourian.
I.6. Langue(s) utilisée(s) dans la pratique
Yoruba, Portugais, Fongbé…
I.7. Éléments matériels liés à la pratique
Patrimoine bâti
La maison NEVIS est le siège actuel du groupe musical de danse bourian des Agoudas mais avant c’est chez les DE SOUZA que se trouve le point de départ du Bourian à l’origine.
Objets, outils, matériaux supports
Plusieurs outils et équipements participent à la pratique du bourian, allant des instruments de musique aux tenues portées par les danseurs. Il s’agit par exemple de :
– Tam-tam
– Rhone
– Patégué
– Singua
– Atéwo
– Masque à tête d’animaux
– Tenue de couleurs vives en fonction du masque
– Hauts parleurs
– Amplificateurs
– Piano
– Guitare
II. APPRENTISSAGE ET TRANSMISSION DU PATRIMOINE
II.1. Modes d’apprentissage et de transmission
La maison NEVIS a toujours été très impliquée dans l’apprentissage et la transmission de cette danse à toute la communauté Agouda. La plupart des familles Agouda qui dansent le bourian aujourd’hui l’ont apprise selon M. NEVIS Bernardin chez les NEVIS qui sont considérés dans la communauté Agouda comme les dépositaires et héritiers directs du bourian par leurs ancêtres qui importèrent cette danse du Brésil. Les danses et les chants du bourian s’apprennent dès le bas âge à tous les descendants Agoudas. Les NEVIS ne sont pas les seuls détenteurs de Bourian à Ouidah. Notons que Francisco Félix de SOUZA est le premier à introduire la Samba et les Bourian à Ouidah pour ses célébrations surtout les 4 octobre pour son anniversaire. Ses arrières petits fils continuent de le célébrer chaque veille de 4 octobre, à lieu, le Carnaval à Ouidah. Les masques et membres de la famille ainsi que les sympathisants traversent la ville en chantant et en marchant d’où le rythme Macha.
II.2. Personnes/organisations impliquées dans la transmission
Les familles DE SOUZA et NEVIS se partagent la priorité sur la danse Bourian. Ce sont elles qui ont répandu le rythme aux autres familles Agouda. Par ailleurs, la Fédération des groupes des danseurs bourian s’occupe aujourd’hui de transmettre et de partager les savoir-faire liés à la danse aux jeunes générations Agoudas.
III. HISTORIQUE
III.1. Repères historiques
L’histoire du Bourian à Ouidah a plusieurs versions. Deux principales se dégagent du lot. Selon la première, le bourian a été importé du Brésil au XVIIIe siècle par le portugais M. José JOAQUIM, ancêtre des NEVIS qui était magasinier Ajudas au Fort portugais chez St JOAO Hotterez. A l’origine le bourian était une danse réservée aux esclaves et avait pour objectif d’apaiser les tensions qui existaient entre maîtres et esclaves. Réservée à la famille NEVIS qui était la seule à pouvoir danser le bourian à Ouidah. Plus tard en 1960 les de-Souza et par la suite les autres familles Agoudas furent intéressées et apprirent également auprès des NEVIS le bourian par soucis d’ancrage et d’héritage culturel de leurs ancêtres esclaves déportés en Amérique Latine. C’est ainsi que le bourian se répandit à toute la communauté Agoudas. Bourian signifie littéralement en Portugais ‘’l’âne’’ chevauché par le roi.
Selon la deuxième, c’est Francisco Félix Chacha de SOUZA qui a introduit le Bourian à Ouidah. Il n’est pas esclave mais Brésilien marchand d’esclave.
III.2. Évolution/adaptation/emprunts du patrimoine
Les instruments de musique moderne comme les pianos, les hauts parleurs, les amplificateurs etc…ont été ajoutés au bourian contrairement aux tams-tams qui était utilisés.
IV. VIABILITÉ DU PATRIMOINE ET MESURES DE SAUVEGARDE
IV.1. Viabilité
Vitalité
Le bourian est un héritage culturel des peuples Agoudas transmis de générations en générations à tous les descendants. Certes leur nombre a baissé avec le temps mais dans le souci de rendre la pratique durable une fédération fut mise en place pour sauvegarder cette danse.
Menaces et risques
Les tenues de danse portées aujourd’hui par des personnes physiques peuvent les rendre malade ou aveugle vu la mauvaise qualité des matières premières qui entre dans la fabrication des masques.
Menaces de disparition
Le bourian est menacé aujourd’hui de disparition car la pratique entre dans la conception de plusieurs personnes comme une simple danse folklorique et la valeur et l’importance qui était la sienne autrefois disparaît peu à peu. Il est parfois confondu avec le Kaleta…
Conflits d’usage
Certaines personnes de mauvaise foi utilisent le bourian pour commettre des vols et des forfaits. La danse du bourian est utilisée de façon abusive, des groupes musicaux non reconnus par la fédération s’inventent et effectuent la danse.
IV.2. Mise en valeur et mesure(s) de sauvegarde existante(s)
Modes de sauvegarde et de valorisation
L’association dénommée ‘’Fédération des groupes musicaux bourian’’ (FEGROMUB) est une association reconnue par les autorités publiques de façon légale et légitime. Ses objectifs sont :
– Restaurer, valoriser et faire rayonner la culture afro-brésilienne bourian au Bénin
– Organiser, encadrer le secteur ‘’BOURIAN’’ pour en devenir des experts auprès des autorités de l’Etat
– Favoriser le dynamisme culturel ‘’BOURIAN’’ à l’échelle nationale
– Créer, développer et entretenir des liens de fraternité, de solidarité et de coopération entre individus ou collectivités territoriales, institutions étatiques ;
– Œuvrer pour le rayonnement de la musique Afro-Brésilienne ‘’BOURIAN’’ au Bénin.
Actions de valorisation à signaler
La pratique de la danse du bourian est apprise à tous les descendants NEVIS et aux autres familles Agoudas afin de la rendre durable pour que les générations à venir en bénéficient également.
Modes de reconnaissance publique
On reconnaît une troupe de danse bourian à travers le rythme musical, les costumes portées et la langue dans laquelle les chants sont exécutés.
IV.3. Mesures de sauvegarde envisagées
–
IV.4. Documentation à l’appui
Récits liés à la pratique et à la tradition
–
Inventaires réalisés liés à la pratique
–
Bibliographie sommaire
– GURAN M. (2001) Aguda : aspects du patrimoine afro-brésilien dans le Golfe du Bénin, Porto – Novo, 2001.
de SOUZA S. La famille de SOUZA : Bénin – Togo. Collection Mémorial du Bénin. – 320 pages
– EPA (2001). Conférence « Agouda : les aspects du patrimoine afro-brésilien dans le Golfe du Bénin. Porto-Novo : 26-30 novembre 2001.
– ALITONOU, Evelyne sauvegarde du patrimoine culturel afro-bresilien : le cas de la danse bourian,2013.
– Pierre Verger : Flux et reflux, op. cit, p 600.
– VERGER, Pierre, Flux et reflux de la traite des nègres entre le Golfe du bénin et Bahia de Todos os santos du XVIIe au XIXe siècle, Gruyter Mouton, 1968.
– SOUZA de, Rachida A., Bourian danse de la mémoire in Ouidah et les patrimoines familiaux, Editions Flamboyant, 1955.
– AGBO, Casimir, Histoire de Ouidah du XVIe au XIXe siècle, Presses universelles ;1955.
Filmographie sommaire
CIRTEF/ORTB, Espace Francophone : tranches de villes : Ouidah. 26 min
Sitographie sommaire
–
V. PARTICIPATION DES COMMUNAUTÉS, GROUPES ET INDIVIDUS
V.1. Praticien(s) rencontré(s) et contributeur(s) de la fiche
Nom, Fonctions, Coordonnées
M. NEVIS Bernadin, Président du FEGROMUB
Fonctions
M. NEVIS Bernadin, Président du FEGROMUB
Coordonnées
M. NEVIS Bernadin, Président du FEGROMUB
V.2. Soutiens et consentements reçus
–
MÉTADONNÉES DE GESTION
Rédacteur(s) de la fiche
– ZINSOU Modeste
– Hervé ACCROMBESSI
– DJOTON Oluwachéoun Mireille
– TOSSOU Ryan
– AGBLO Laurent,
– ADOSSOU Carmel Koffi Rodolphe.
Enquêteur(s) ou chercheur(s) associés ou membre(s) de l’éventuel comité scientifique instauré
QUENUM Carhel , Coordonnateur de l’enquête
Lieu(x) de l’enquête
Ouidah, Arrondissement 1, quartier ABATA1
Date/période de l’enquête
Jeudi le 22 juillet 2021
Date de remise de la fiche
Année d’inclusion à l’inventaire
–
N° de la fiche
FI_8 Bourian
Identifiant ARKH
–


